Comment les gens se font manipuler sans le savoir !

Avr 2012 | 3 commentaires

Cold reading

 

Le cold-reading ou «lecture à froid» est un ensemble de techniques utilisé par les magiciens pour faire croire au spectateur qu’ils détiennent un pouvoir mental tels la télépathie, le don de prophétie, etc. Il s’agit tout simplement d’illusionisme et de manipulation derrière lesquels, il y a toujours un truc.

 

Le mentaliste – c’est ainsi qu’on les appelle – est un observateur hors pair. Un Sherlock Holmes aux objectifs bien précis. Il analyse tout, prend toute information et l’utilisera à ses fins : faire croire qu’il détient un pouvoir surnaturel. Vous le faites aussi… sans le savoir, pas aussi affiné qu’un expert en la matière certes, et vous n’avez sans doute aucune arrière pensée en le faisant, mais vous le faites lorsque par exemple, vous observez une alliance à l’annulaire d’une personne et en déduisez qu’il est marié. Le professionnel, lui, va pousser l’analyse à son extrême. Chaque donnée va être un indice qui va permettre de déduire des évidences, cachées pour la plupart d’entre nous.

 

Après avoir récolté ainsi quelques indices, le magicien va user de stratagèmes verbaux pour amorcer l’illusion et vous soutirer bien d’autres informations à votre insu.

 

Il peut, par exemple, vous expliquer en introduction qu’il est en mesure de lire dans vos pensées mais que cela vient par bribes d’images, floues au départ qui se précisent petit à petit. C’est alors qu’il commence à donner quelques affirmations vagues et qui s’appliquent à la majorité d’entre nous. Il guette évidemment vos réactions, conscientes ou inconscientes (la respiration, les expressions faciales, etc), et en fonction de vos réponses, oriente ses phrases jusqu’à donner l’illusion complète qu’il sait effectivement des choses qu’aucune autre personne n’aurait pu savoir.

 

En clair, en discutant avec vous, le magicien va exploiter les voies prometteuses, abandonnant au fur et à mesure celles qui ne mènent à rien.

 

Vous reconnaitrez ici l’art de faire de nombreuses voyantes. Ce procédé, dans la profession, porte le nom de «flash», sorte de reconstitution mentale à partir de données objectives (telles les indices que nous avons vu plus haut) et subjectives (le ressenti personnel, la sensation provoquée par une image, etc.) perçues par rapport à autrui ou à un événement. Ce n’est pas du charlatanisme, mais une fonction cognitive tout à fait normale. Là où c’est dangereux, c’est de faire croire à une puissance supérieure et pire : balancer dans l’inconscient du client des suggestions qui enferment et lui volent sa liberté.

 

Un jour, la fille d’une amie me téléphone en pleurs. Elle ne se sentait pas bien dans sa peau et ses études étaient laborieuses pour elle. Elle doutait de pouvoir réussir son baccalauréat. Ainsi avait-elle décidé de consulter des voyantes pour éclairer un peu son avenir. Les trois cartomanciennes qu’elle était allée voir lui affirmèrent toutes le même avenir sombre (ou du moins c’est ce qu’elle a interprété !) : «Tu n’auras pas ton examen et tu feras une grave dépression !». Ce qu’elle a retenu est une prophétie auto-réalisante : parce que suggestionné cela se réalise et parce que ça se réalise, cela confirme ce qui avait été dit. J’appelle cela un «piège à con», dans lequel, hélas, il m’arrive encore de tomber malgré toute mon expérience. Heureusement, dans la majorité des cas, celui qui me suggestionne n’est rien d’autre que moi-même. Quant aux suggestions provenant de l’extérieur, je les contrecarre à la source.

 

Ce soir là, j’ai pris tout de suite la voiture pour me rendre chez elle. Si elle avait peur de se planter aux examens, je décidais d’utiliser ce précieux carburant à d’autres fins : la peur de réussir. J’expliquais logiquement en quoi ce n’était pas aussi facile une fois que l’on a son diplôme, parce qu’alors commençait une vie difficile d’adulte qui ressemblait plus à une jungle qu’à un havre de paix. Elle allait devoir trouver un logement, de l’argent, de nouveaux amis, faire ses repères, etc, etc, etc. J’entrais bien dans les détails, argumentant à coups d’expressions sensorielles qui la transportaient dans ma description angoissante de son futur potentiel. Elle fut terrorisée.

 

Elle a eu son bac. A fait l’école des Beaux-Arts. Son rêve s’est réalisé. Je suis retourné la voir pour lui dire que je m’étais trompé : la vie d’adulte, il n’y rien de mieux parce qu’elle rime avec liberté.

 

Face à ce type de situation, soyez critiques. Sachez déceler les cold-readers. Et si vous deviez vous laisser influencer, faites-le de manière constructive et créative mais fermez-vous aux influences subtiles disgracieuses et n’hésitez pas à corriger les suggestions limitatives. Lorsqu’un professeur claironnait autoritairement que l’année allait être difficile parce que désormais nous allions devoir ingurgiter le programme annuel en 6 mois, je rigolais malicieusement en moi et me disais «Bien. Eh bien je le ferai en 3 mois !». Je ne me laissais pas influencer par la peur de ne pas y arriver.

 

Le comble, c’est qu’aujourd’hui, je suis moi-même devenu un expert en cold-readring. Non pas dans la voyance mais dans mon métier, à l’affût de tout indice qui me permette de cerner au mieux le problème de celui qui vient à moi. J’adore. Cela fait très magique, voire un peu sorcier. Mais il n’y a rien d’étonnant. C’est même plutôt rassurant. Ainsi, un jeune homme passe la porte de mon cabinet en me provoquant gentiment : «Aujourd’hui, je ne vous dirai pas où j’ai mal….» «Tu veux parler de ton épaule gauche qui te fait souffrir depuis depuis 3 semaines ?» ou bien cette collègue de classe d’ostéopathie à qui je demandais si elle allait avoir les règles et qui les a eues le lendemain avec 2 semaines d’avance, à son grand étonnement; ou enfin cet ami qui vient pour un mal de dos et chez qui je découvre qu’il a une maitresse et qu’il le vit mal, alors qu’il ne m’a même pas encore serré la main.

 

En réalité, le corps est un livre qui raconte son histoire.

 

Wladislas BARATH

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3 Commentaires

  1. Julie

    C’est vrai… Moi, ça me déprime parfois, car je me demande ce que clame mon corps à qui sait le lire, et que malgré tous mes efforts je n’arrive pas à entendre! Comme un ami très cher, absent, et qui me manquerait beaucoup, et dont je ne pourrais avoir des bribes de nouvelles que par des tiers (ces thérapeutes qui savent « écouter » le corps, ou le lire, comme vous dites).

    Réponse
  2. Mélanie

    Bonjour.

    Je ne peux que confirmer, vous êtes un expert en la matière. A peine avais-je parlé que vous aviez pu voir beaucoup de choses en moi.
    Je vous admire sincèrement.

    Réponse
    • Wladislas BARATH

      C’est vrai, en consultation, il faut savoir devenir un Sherlok Holmes. Le tout est de savoir pourquoi et pour qui on le fait. Et puis il y a l’art et la manière. C’est difficile de trouver le juste chemin pour générer un changement chez l’autre, parce qu’il a une histoire unique, parfois douloureuse, qu’il protège et qu’il n’aime pas trop remuer.
      En tout cas, le corps est un livre qui raconte sa propre histoire. Le lire à voix haute de but en blanc devant la personne est quelque peu déconcertant (on peut se sentir tout nu et puis quelque part, si j’ai pu le lire, d’autres sont susceptibles d’en faire autant, non ?). Le contexte thérapeutique prend alors ici toute sa valeur.
      De mon côté, j’espère juste émerveiller les gens comme je le suis devant ce chef-d’œuvre.

      Réponse

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